Le douzième à quoi ça ressemble chez les nanas ? Balayage de sources
Avec l’arrivée d’Aerin et de Druss on a commencé à se demander comment habiller les arnoriens. La base de départ a été de se dire que les inspirations sont du douzième siècle.
Une question qu’on se pose en parallèle est comment habiller les gens de Dol Amroth et les personnes (Laegalad et Ellorien) qui ont fait des vêtements de Dol sont aussi parties sur des inspi douzièmisantes. Douzième tardif ou début treizième.
Donc je me suis dit : en termes de visuel, comment faire pour utiliser le douzième à deux endroits différents de la terre du Milieu tout en créant deux impressions bien différentes.
Pour se donner des lignes directrices pour l’Arnor, il faut se replonger dans les bouquins. Si j’avais un retourneur de temps, je relirais les CLI et les passages du SDA qui parlent de l’Arnor et j’essaierais de refaire la frise chronologique pour comprendre comment fonctionne cette région.
Mais comme ça prendrait du temps, et que les remarques d’Aerin dans la fiche perso d’Ellorien m’ont donné envie de battre le fer pendant qu’il était chaud, je ne vais pas me pencher maintenant sur Tolkien, parce que ce qui ébullitionne dans ma tête là maintenant, c’est les
inspirations historiques pour les femmes. Druss, Bergil, et des tas de dévéistes sont facilement plus pertinents que moi pour la partie Tolkien, donc pour le moment, je leur laisse cette partie-là. Si je me lève avec un pic de motivation de dingue, j'apporterai ma pierre à l'édifice... mais pas maintenant.
Pour commencer, une ou deux généralités simples, mais utiles sur le douzième siècle et la manière dont ont s’habille (je reste *très* générale, attention) :
- il n’y a pas de rupture brutale entre le onzième et le douzième, on a des images début douzième qui ressemblent à s’y méprendre à des images milieu onzième. Les fameuses grandes manches qui tombent jusqu’au sol qu’on voit sur les statues de la cathédrale de Chartes, on commence déjà à les voir au onzième, sur la tapisserie de Bayeux. Une différence marquante au douzième est l’arrivée du moulant chez les femmes. Le onzième comporte déjà pas mal de moulant sur le ventre pour les hommes (dans les dessins, c’est souligné par des petits traits), mais pas autant pour les femmes. Au douzième, ça y est, on en voit et on en voit même plein. On a du très moulant comme sur les statues de la cathédrale de Chartres ou d’Angers (et aussi dans les enluminures du Hortus Deliciarum… mais la version qui nous est parvenue aujourd’hui est une copie, car l’original a été détruit). Et on a aussi du simple « près du corps », moins serré, mais sans plis et sans flottement au ventre. On a aussi du blousage spécial qui drape le ventre en le soulignant et on devine qu'une ceinture est planquée sous les plis, comme on voit souvent au onzième.
Le passage du onzième au douzième est très bien expliqué et illustré ici
http://freespace.virgin.net/sarah.doyle/KIT.HTM- il n’y a pas de rupture brutale non plus entre la fin du douzième et le début du treizième. Les formes de col perdurent un peu, les coupes serrées perdurent un peu aussi. On continue d’en rencontrer épisodiquement pendant le treizième. Ce qui disparaît totalement à un certain moment (je suis incapable de dater ça), c’est les grandes manches qui tombent très bas.
- le douzième, c’est cool, parce qu’enfin, on voit des femmes sans voile. Au onzième c’est assez casse-pieds parce qu’il y a énormément de femmes avec un voile sur les images peintes ou sculptées. Donc on a beaucoup de mal à savoir comment sont les cols de vêtements, parce qu’ils sont cachés. Youpi, maintenant, on les voit. Il y a beaucoup de cols à amigaut, avec des parmentures ou des galons… mais pas que. Il y a aussi des cols sans parmenture, et de différentes formes, comme des cols en V (pas aussi en V que les cols modernes de nos teeshirts, quand même).
- Chez les femmes, on garde des choses qu’on voyait déjà au onzième, comme les manches serrées plissées… qui passeront progressivement de mode en avançant dans le siècle.
- Petit enfonçage de portes ouvertes (vous le savez déjà, mais je le rappelle) : les grandes manches pendantes, ou les manches plissées faites de manches trop longues et portées serrées… sont des attributs de femmes riches. Tout bêtement parce que ça consomme beaucoup de tissu.
- Le douzième amène les capes circulaires chez les femmes. Au onzième, on n’en voit quasiment pas (sauf sur l’impératrice, des saintes et des figures bibliques), car les femmes portent plutôt une chape.
Maintenant, les images…Bon, par contre, j’ai quasiment aucune image montrant des personnes de condition moyenne, et quasiment toutes les sources sont d’ordre religieux, donc c’est toujours à examiner avec des pincettes.
Je les présente dans l’ordre chronologique, pour montrer l’évolution.Les dates sont approximatives, hélas. La plupart du temps, on ne trouve pas la date de la sculpture, seulement celle de l’édifice ou du stade de construction des morceaux de l’édifice.
Miniature anglaise de 1111 : sur cette image, on a l’impression de voir un vêtement typique du onzième, avec la chape et les manches serrées et plissées
https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653425355594425378Allégorie de Babylone, la Grande Prostituée, chapiteau de l’église de Chauvigny dans le Poitou (je n’ai pas trouvé la date exacte de la construction, j’ai juste l’indication que c’est douzième)
Les grandes manches et la décoration du tissu sont là pour indiquer une idée de débauche de richesse. On a une robe plutôt près du corps pour le buste et le ventre et une riche ceinture bien visible.
https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653424229508231922Danse de Salomé devant Hérode, sculpture sur un chapiteau de la cathédrale St Etienne (de Toulouse ?) daté de 1120 à 1140Le col est richement décoré, le bord des manches aussi, et la robe est très moulante, le tissu est tendu sur le ventre on voit les plis. Le sculpteur exagère volontairement cette impression de moulant, puisque l’idée est de montrer que Salomé est une séductrice.
http://www.edu.augustins.org/img/58.gifhttps://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653426064967199346Dalila coupant les cheveux de Samson, chapiteau de l’église St Pierre à Aulnay de Saintonge 1140-1170Le style des vêtements, surtout les voiles, fait penser à une mode plutôt milieu douzième que fin douzième. L’église a été reconstruite entre 1140 et 1170 donc je n’ai pas la date exacte des statues, mais je les classe vers le milieu du siècle… après, si ça se trouve je me goure. La femme de gauche a une cape agrafée sous le menton, et celle de droite a un col à amigaut dont on aperçoit (je ne sais pas si on le verra au scan) une étroite parmenture à bout carré.
https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653424210954850930Les statues du portail royal de la cathédrale de Chartres. Le portail a été fait entre 1142 et 1150[b], donc on est milieu douzième.
On retrouve les éléments « typiques » du douzième : les grandes manches, des cols avec des parmentures décorées, les bords des manches et des manteaux décorés aussi, de galon ou broderie, les ceintures de galon à pendouillis de cordelières.
Là, je vous invite à vous balader dans mon album, il y a le choix
https://picasaweb.google.com/elisabes/Chartres?authkey=Gv1sRgCKWm_cnGh4jt5wE
Sur le portail de Chartres, on a plusieurs types de cols féminins :
-
le col à amigaut avec parmenture ou galon
https://picasaweb.google.com/elisabes/Chartres?authkey=Gv1sRgCKWm_cnGh4jt5wE#5386233100532536322- le
col en V qui montre bien le vêtement de dessous
https://picasaweb.google.com/elisabes/Chartres?authkey=Gv1sRgCKWm_cnGh4jt5wE#5386233155716012050 là on voit que c’est un col fendu (une simple fente) qui est « écarté » par le cou de la personne, on voit même les plis que cet écartement crée sur les épaules.
Ce type de col se retrouve fréquemment au douzième. Par exemple :
-
la madonne de Viklau qui vient du Gotland en Suède et date du milieu du douzième http://f1.grp.yahoofs.com/v1/ENJ0Tsh4np7B1Lfeqln6uzpp52dT1sVi3DyZpSkBdG7WtBgoaamNUThi_ZQ8ATIqGw03ZqOIKCdnJB6Kw69-cvaKYgX44hs/3.%20Sources/Nordic%2012th%20century/Viklau4.jpg ou ici en zoomé
http://www.gelfling.dds.nl/bliaut/swedish%20bliaut%20det.jpg-
la dame du chapiteau de colonne de l’église St Gervais St Protais de Civaux qui date du début du douzième (je sais, c’est flou, je n’arrive pas à trouver la date exacte) a un col en V bien marqué. On ne sait pas ce qu’elle porte dessous à cause de sa cape, ne cape qui se ferme sous le menton, et visiblement semi-circulaire. Photo du chapiteau
http://www.route-romane.net/default_fr.php?gzev=im_bk_341_2361 picasa permet de zoomer l'image, zoomez vous verrez le col bien plus précisément
https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653424295716911986- cette statue, sans provenance ni date (caca)
http://www.eg.bucknell.edu/~lwittie/sca/originals/column_queen.jpgPour le
col à amigaut, on a aussi plein d’images différentes par exemple :
- celle-ci, toujours sans date ni provenance
http://www.eg.bucknell.edu/~lwittie/sca/originals/column_king.jpg-
Chronique du monde et de l’histoire anglaise de John de Worcester, manuscrit anglais 1128-1131 http://image.ox.ac.uk/show?collection=corpus&manuscript=ms157 il faut aller à la page 77b pour voir cette image, on ne peut pas linker sur une page préciseOn a aussi des
cols ronds, comme ici, sur un manuscrit des
Comédies de Térence qui viennent d’une abbays de St Albans en Angleterre, milieu onzièmehttp://image.ox.ac.uk/show?collection=bodleian&manuscript=msauctf213Il faut aller aux folios 9 et 10 en navigant, on peut pas linkerCes images sont intéressantes parce qu’on voit bien que le ventre moulant est du à un blousage spécial de la robe qui est identique à ce qu’on trouve au onzième siècle. On a les grandes manches pendantes et la robe de dessous avec des manches serrées plissées
Au
folio 25 même col rond, et des manches droites simples bien qu’un peu plissées
Avançons maintenant vers la
deuxième moitié du siècle avec...
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Une reine du psautier de Winchester 1160-1170http://www.gelfling.dds.nl/bliaut/winchester%201.jpgAvec des
manches à la coupe un peu bizarre, parce que les manches s’élargissent brutalement, et bas sur le bras, mais qu’on retrouve à d’autres endroits.
…Par exemple ce
couvercle de coffre daté de 1180 (et conservé dans le Morbihan… mais je n’ai pas la provenance)
https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653424278307740562… Ou ce
sac-reliquaire dit « De Chelles » daté de 1170[b]
http://www.gelfling.dds.nl/bliaut/couple%20with%20bird%201170.jpg
… Ou le [b]Hortus Deliciarum qui date de vers 1180, avec ses bandes de galon sur le biceps et ses lacets au côté. Ici, c’est une allégorie de l’Orgueil, d’où la robe riche (Corwynna a comme hypothèse que les bandes de galon sur le biceps, c’est vraiment pour les riches)
http://www.gelfling.dds.nl/bliaut/Hortus%20Deliciarum%20color.jpg… Ou le
sceau de la comtesse de Flandres, daté de vers 1170https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653424213474789570On dirait que les manches qui s’agrandissent brutalement et vers le bas du bras sont une
mode de la fin du siècle.Continuons cette
fin de siècle avec...
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Une dame sur le portail de la cathédrale St Maurice d’AngersJ’ai du mal à trouver une date, mais il semble être fin douzième car « mis en place après la construction de la façade » et celle-ci a été finie vers 1180. Donc c’est fin douzième.
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/2/26/Angers_Cathedral_sculpture_at_west_door_TTaylor_bliaut.jpghttp://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/11/Angers_Cathedral_sculpture_at_west_door_TTaylor.JPGJe lis que c’est le même maître qui a travaillé sur les sculptures de la cathédrale de Chartres.
C’est la fameuse statue qui nous permet de sourcer les lacets sur le côté. La robe est très moulante, les manches aussi, et plissées. J’ai eu une discussion intéressante avec Corwynna au sujet de la ceinture : elle est typique des ceintures à « pendouillis » comme celles de la cathédrale de Chartres… mais sans pendouillis ce qui n’est pas logique car on a bien le beau nœud plat. On pense que la statue a été mutilée et restaurée, et que la restauration a lissé les traces de casse des pendouillis. Après, on n’en sait rien… mais c’était notre conclusion.
Cette statue commence à avoir un style treizièmisant. On n’a plus les grandes manches pendantes et on a moins de grosses décorations que sur les sources plus anciennes. La photo n’est pas très précises, ça mériterait une meilleure pour voir s’il y a des galons sur le col, les manches et le bord du manteau.
- A noter qu’on a
des lacets sur le côté dans le psautier de Winchester… sur un homme (enfin… une bestiole masculine)
https://picasaweb.google.com/elisabes/DragonVert#5653400214297561586- Attention, rareté ! Un paysanne (yihaaaaaaa)
du psautier de Fécamp (vers 1180)http://webpages.mcgill.ca/staff/Group2/jhobbi/web/as/images/mantle/august.jpgEt toujours dans le psautier de Fécamp, une dame qui file
http://www.wga.hu/detail/zgothic/miniatur/1151-200/2french/02f_1150.jpg- Aliénor d’Aquitaine quittant le prince Jean, fresque de la chapelle Ste Radegonde de Chinon.
http://peintures.murales.free.fr/fresques/France/Centre/Indre-et-Loire/Chinon/Chinon_chapelle_radegonde_2cavalier_1couronn%C3%A9_aquarelle.JPGCette peinture n’est pas exactement datée mais « La technique ainsi que le contexte architectural la situent à la toute fin du 12e siècle »
Le style de cette peinture est quasiment « typique treizième ».On ne voit pas grand-chose de la robe. La cape est agrafée sur l’épaule (et ça tombe bien vu qu’on a une source de broche portée à l’épaule ramassée par Bombadil dans le Galgal pour l’offrir à Baie d’Or) et doublée de vair (les dessins bleus et blancs sont la représentation héraldique du vair). Jeanne, la fille d’Aliénor, chevauche devant elle, sa robe a un joli motif de rosaces (pas très visible, je vous l’accorde) claires sur fond de tissu brun.
Et sinon, fin douzième on tend vers quoi ? On tend aussi vers les images que les deux filles de Dol Amroth ont choisies, qui évoluent doucement vers le treizième (sources trouvées par Laegalad et Ellorien)
J’arrive pas à afficher la notice de ce manuscrit, donc vous n’aurez pas les dates, mais si vous arrivez à l’afficher, dites-moi !
http://liberfloridus.cines.fr/cgi-bin/affich_image?020532,s,2005,0,0,124,0,128Autre manuscrit, toujours de la bibliothèque de Ste Geneviève, mais j’ai toujours pas a date
http://www.hemiole.com/reconstitution/images/atelier/Brodeurs/Brodeuse/sources/source6p.jpgBref, tout ça pour montrer quoi ?Pour montrer qu’il y a une évolution à travers le douzième et qu’on peut utiliser ce siècle pour l’Arnor ET pour Dol sans se marcher sur les pieds. Parce que la mode a des différences assez sérieuses pour que ça se remarque.
Les filles qui font du Dol ont choisi la fin du douzième, là où les costumes commencent à ressembler à du treizième (fini les manches immenses).
Pour l’Arnor, il serait facile de taper tout simplement dans ce qui est plus ancien : début, milieu du douzième. Voilà quelques
suggestions pour réaliser les costumes. C'est juste des idées qui sortent de ma tête, je les trouve pas mal, et je veux bien votre avis :
-
pas encore de lacets sur les côtés. J’ai trouvé des lactets sur la cathédrale d’Angers, le Hortus Deliciarum et le psautier de Winchester qui sont… tardifs
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les vêtements peuvent être près du corps sur le buste et le ventre, mais c’est pas obligatoire. On a le super-moulant de Salomé (mais se méfier vu le contexte où on suggère que c’est une femme luxurieuse) et on a le blousage qui souligne le ventre des Comédies de Térence.
-
col à amigaut avec le bas bien carré, comme sur Salomé et sur les statues de Chartres, col fendu qui montre le vêtement porté en dessous comme à Chartres ou sur la madonne de Viklau, col rond comme dans les Comédies.-
cape attachée à l’épaule par une broche, puisque c’est sourcé Tolkien. Je suggère aussi la
cape semi-circulaire attachée sous le menton comme celle de l’église de Civaux afin de se distinguer de la cape avec deux fermaux et un cordon choisie par Ellorien.
-
montrer plusieurs couches de vêtements par le col et les manches. Le vêtement de dessous avec un col à amigaut porté avec un vêtement de dessus à col fendu ou en V par exemple, comme à Chartres, et des manches de dessous qui se voient. Comme les arnoriennes du DV risquent de ne pas être des reines (y en a plus !) et ne pourront sans doute pas se payer des manches pendantes, on peut imaginer des manches « de dessus » un peu larges, façon onzième, et légèrement plus courtes que les manches du dessous, portées plus serrées.
Voilà.... y a de la couleur partout parce que j'ai voulu attirer l'oeil vers les éléments de costume... c'est assez long, y a plein de gras... c'est pas forcément évident pour s'y repérer. Je demande votre indulgence, ce post m'a demandé 5 heures de travail et un bon paquet d'edits